Quentin M., ingénieur d’études en Urbanisme Favorable à la Santé (UFS) à l’Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique (EHESP), Rennes
Peux-tu nous raconter ton parcours d’études ?
Mon parcours d’études n’a pas vraiment été linéaire. Après avoir obtenu mon baccalauréat Sciences Economiques et Sociales en 2012, j’ai effectué un BTS dans le domaine du tourisme que j’ai obtenu en 2014. Force est de constater que cette formation ne m’avait pas apporté ce à quoi je m’attendais (surtout en termes de valeurs), j’ai décidé de prendre quelques « années sabbatiques » pour avoir le temps de requestionner réellement mes aspirations personnelles et mon projet professionnel. J’avais initialement prévu deux années de « pause » qui se sont finalement transformées en quatre… (il faut se laisser le temps parfois). Durant ces 4 années, j’ai pu me confronter à différentes expériences professionnelles (très éloignées de ce que je fais actuellement mais très formatrices : services de livraison, responsable de bar, GameMaster, etc.) puis j’en ai profité pour partir longuement à l’étranger, notamment pour parfaire mon anglais.
Après de longues réflexions, et me rappelant que les seuls apports de ma précédente formation qui m’avait passionnés étaient liées à la géographie et aux approches territoriales, j’ai intégré la licence professionnelle MATU (Métiers de l’Aménagement des Territoires et de l’Urbanisme) à l’IGARUN en 2018. Après l’obtention de cette licence, et ayant réalisé que l’aménagement des territoires constituait une discipline multisectorielle, j’ai décidé que j’avais encore besoin d’en explorer d’avantage et j’ai intégré le Master GAED en 2019. J’ai poursuivi avec le parcours AGT en 2ème année (Aménagement et Gouvernance des Territoires) et j’ai obtenu mon Master en 2021.
Durant le Master 2, j’ai effectué mon stage de fin d’études à l’EHESP à Rennes, en tant que chargé d’études sur un projet de recherche-action visant à analyser les liens entre espaces verts urbains et santé dans 6 villes du Réseau français des Villes-Santé de l’OMS. Ce stage m’a permis de découvrir une nouvelle facette (encore) de l’urbanisme, intrinsèquement liée aux enjeux de santé, environnementaux et climatiques et de me former activement à l’approche de l’UFS. Dans le prolongement de mon stage, j’ai été engagé en tant qu’ingénieur d’études sur un projet de recherche international visant à analyser différents documents d’urbanisme à l’échelle de Rennes Métropole et leurs liens avec les enjeux climatiques.
Quelles fonctions occupes-tu aujourd’hui ?
Actuellement, je suis ingénieur d’études au département des Sciences en Santé Environnementale de l’EHESP. J'ai commencé par travailler sur le volet recherche dans différents projets, puis progressivement sur les volets expertise et formation. Aujourd’hui, 80% de mon activité s’oriente autour de l’enseignement et de la formation, à la fois auprès des publics de l’EHESP (masters, élèves fonctionnaires) mais surtout auprès des professionnels de l’aménagement, de l’urbanisme, de la santé publique et de l’environnement (événements dédiés à l’UFS et formation continue).
Sur le volet recherche-expertise, je participe notamment à créer des outils pour accompagner le changement des pratiques et permettre aux professionnels de mieux intégrer les enjeux santé-environnement-climat dans les politiques d’urbanisme et projets d’aménagement. Sur le volet formation, je créé des programmes pédagogiques permettant d’acculturer les professionnels et de les accompagner dans l’utilisation des outils produits par l’EHESP (mais pas que). Je suis notamment co-responsable du Diplôme d’Etablissement Santé Publique et Aménagement des Territoires (SPAT), dans lequel j’enseigne et où nous mélangeons différents professionnels (urbanisme, santé et environnement) et les formons à travailler ensemble sur l’UFS.
Conjointement, et ce depuis janvier 2024, je suis également chargé de mission pour l’Institut One Health (IOH), qui est un consortium de trois écoles (EHESP, AgroParisTech et l’Ecole Nationale des Services Vétérinaires) qui forme les décideurs publics et privés à l’approche Une Seule Santé (One Health). Cette approche, dans lequel s’inscrit l’UFS, vise à optimiser et à équilibrer l’ensemble des santés (humaine, animale, végétale et des écosystèmes) de manière intersectorielle et intégrée.
Qu’est ce qui te plait dans ce métier ?
Beaucoup de choses ! Le monde de la recherche d’abord, qui permet de rester constamment dans une position « d’apprenant » et de ne pas « figer son savoir », à la fois de par tous les événements que ça implique (colloques, séminaires, etc.), mais aussi les nombreuses personnes avec lesquelles je suis amené à travailler en France et à l’international (sociologues, anthropologues, géographes, hydrologues, climatologues, etc.). Puis la formation, qui permet de mettre en pratique tous ces savoirs de manière plus concrète et ce auprès d’un public de professionnels extrêmement diversifié (élus, urbanistes, aménageurs, écologues, médecins, etc.). Je pense que la plus-value de mon métier repose sur cet équilibre recherche/formation qui permet un réel rapprochement entre le monde scientifique et les professionnels de terrain, qui pour la plupart ne se parlent que très peu. L’objectif étant de replacer l’humain (et le non humain) au cœur des décisions et d’aboutir à des politiques et des projets qui soient moins compartimentés.
D’un point de vue organisationnel, j’apprécie fortement le fait d’être pleinement autonome (à ne pas confondre avec seul) dans la manière dont je gère mon temps, mes différents projets et les sujets que je souhaite traiter.
Avec le recul, comment vois-tu ta formation universitaire ?
Dans un 1er temps, la licence professionnelle que j’ai suivie m’a permis d’acquérir les bases théoriques concernant l’aménagement (histoire, acteurs, enjeux, etc.) et l’urbanisme (de planification et opérationnel).
Ensuite, et n’ayant pas suivi un cursus « classique » (3 ans de Licence), j’avais besoin de plus de connaissances, et je ne regrette en rien le fait d’avoir poursuivi en Master. Bien que généraliste, celui-ci donne des clés de compréhension, permet d’approfondir les dynamiques territoriales en place, les enjeux en milieu urbain et rural, et les différentes politiques sectorielles associées. Les échanges que l’on peut avoir avec des enseignants qui se rendent disponibles permet d’élargir les réflexions et d’ouvrir de nouvelles perspectives qui ne sont pas forcément abordées au cours de la formation.
Le stage de fin d’études n’est également pas à prendre « à la légère » puisqu’au-delà d’une future opportunité professionnelle, il permet encore de se spécialiser, ou de s’ouvrir, à des sujets ou thématiques qui n’auraient pas été pleinement approfondies, ce qui fut le cas pour moi concernant les liens entre urbanisme et santé. Enfin, en toute modestie, et si elles en ont la possibilité, j’encourage réellement les personnes qui hésiteraient à reprendre leurs études pour des raisons de longues pauses, de capacité à se remettre dans des apports théoriques, de faibles connaissances de certains sujets ou autre, à le faire. Les parcours de chacun·e sont singuliers et c’est aussi ce qui permet de nourrir les formations.